Les tensioactifs biologiques produits par les micro-organismes sont des molécules tensioactives composées de particules hydrophiles (qui aiment l’eau) et hydrophobes (qui repoussent l’eau). Ces composants réduisent la tension de surface et les interactions de surface entre les solutions aqueuses et les mélanges d’hydrocarbures. Grâce à leur non-toxicité et biodégradabilité relatives, ainsi qu’à la facilité de leur production à partir de matériaux renouvelables, les tensioactifs biologiques sont considérés comme une possible alternative verte aux tensioactifs chimiques utilisés dans nombre de produits commerciaux, tels que les détergents et les produits d’entretien, les produits de soins personnels, les cosmétiques, les additifs alimentaires et pharmaceutiques.
Avec le soutien du projet BioFrost financé par l’UE, les scientifiques étudiant la biodiversité des tensioactifs microbiens produits dans des environnements à basse température se sont penchés sur le potentiel commercial de ces biomolécules écologiques.
Dans son article paru dans la revue
«Trends in Biotechnology», l’équipe de recherche du Centre allemand de recherche en géosciences GFZ et de l’Université d’Ulster a proposé des stratégies futures pour renforcer la compétitivité industrielle des tensioactifs biologiques.
L’une des auteurs du rapport, la Dr Amedea Perfumo, citée par le
Centre allemand de recherche en géosciences GFZ, estime que les tensioactifs biologiques possèdent un «potentiel énorme». Ils peuvent être produits à partir de déchets à prix abordables tels que les sous-produits de l’huile d’olive et les huiles de cuisson. Grâce à leur capacité de fonctionnement à des concentrations plus faibles, ils peuvent effectuer le même travail même s’ils sont utilisés en quantités plus petites. Elle a également souligné la caractéristique supplémentaire des tensioactifs biologiques: leur capacité de fonctionnement à des températures inférieures à 0 °C.
Dans l’article paru dans la revue, les scientifiques ont fait remarquer que, grâce à l’ajout des tensioactifs biologiques, les biodiesels peuvent devenir un carburant de choix de par l’augmentation de leur fluidité à des températures plus froides. Le biodiesel est un carburant vert renouvelable dont la combustion est plus propre que celle de l’essence et peut être produit à partir de déchets et de matériaux à prix abordables, tels que les huiles végétales, les graisses animales et les huiles de cuisson recyclées. Comme le souligne la même étude, ces tensioactifs biologiques peuvent également faire agir les détergents à des températures de lavage plus froides. Cela contribue à l’économie d’énergie.
Éviter les inconvénients du lavage à froid
Les scientifiques soutiennent que les capacités antimicrobiennes, antiadhésives et de suppression de biofilm qui sont naturelles pour de nombreux tensioactifs biologiques peuvent être exploitées pour assurer la propreté des vêtements à des températures inférieures. Le biofilm est composé de bactéries liées par une matrice de glucides, semblable à du mucus, et qui adhère à la surface. «Ainsi, lorsqu’ils sont ajoutés aux produits de lessive, les tensioactifs biologiques remplissent une double fonction: détergente et bactéricide», ont expliqué les scientifiques. Et d’ajouter que les tensioactifs biologiques peuvent également être utilisés pour nettoyer la pollution des eaux froides des océans. Selon la Dr Perfumo, les scientifiques qui n’ont pas la possibilité de se rendre personnellement dans les régions polaires pour prélever des échantillons «peuvent tout simplement obtenir les organismes des collections de souches. Cela est à la portée de tous».
Les enzymes actives à basse température produites par les bactéries extrêmophiles – celles qui vivent dans des conditions extrêmes de température, de pression ou de concentration chimique – ont déjà été synthétisés à des fins industrielles. Selon la Dr Perfumo, les tensioactifs biologiques sont les suivants sur la liste. Les scientifiques ont conclu qu’il existait des caractéristiques des tensioactifs biologiques liées à la fois à l’approche de recherche et à celle de l’expérimentation, «qui devraient être davantage abordées» pour continuer à progresser dans leur utilisation et applications.
Le projet BioFrost (Life at its extremes: Biodiversity and activity of microorganisms in deep permafrost) qui s’est achevé en 2017, a étudié comment les micro-organismes ont survécu dans la biosphère profonde du permafrost terrestre où les températures sont inférieures à zéro et où l’oxygène manque.