Les matériaux ont souvent un comportement très différent selon qu'ils se
présentent sous leur forme habituelle ou à l'échelle nanométrique. Ils
entrent alors dans un nouveau monde, défini par la mécanique quantique
plutôt que par la mécanique classique, et montrent d'étranges propriétés
électriques, optiques et magnétiques. Ces propriétés exotiques, si
recherchées pour réaliser des produits révolutionnaires, peuvent avoir
des effets indésirables sur les tissus biologiques.
Près d'une décennie de recherches sur les risques potentiels des nanomatériaux manufacturés a montré la complexité et en même temps la nécessité d'une standardisation de l'évaluation du risque. Un important consortium de 28 partenaires, issus d'instituts européens et américains travaillant sur la nanosécurité, a lancé le projet
NANOMILE (Engineered nanomaterial mechanisms of interactions with living systems and the environment: a universal framework for safe nanotechnology), financé par l'UE, afin de développer un cadre universel pour des nanotechnologies sûres.
Le système de classification identifiera les impacts biologiques ou environnementaux et élucidera les interactions entre le nano-matériau et les molécules biologiques à toutes les échelles, depuis la cellule jusqu'à l'écosystème. Il identifiera également les mécanismes biochimiques spécifiques de toxicité, s'intéressant particulièrement aux voies conservées dans les organismes. Il bénéficiera du développement de méthodes de test in vitro de remplacement et de méthodologies à haut débit, qui seront également utilisées pour les tests futurs.
Les chercheurs de NANOMILE ont développé des bibliothèques de nanoparticules qui appuieront la stratégie de regroupement et de classification des nanoparticules de synthèse. Le projet s'est basé sur l'hypothèse selon laquelle la toxicité résulte d'un certain nombre de propriétés physico-chimiques contribuant à une intensité variable et une signification relative, et constitue ces bibliothèques en gardant à l'esprit cet objectif de classification.
La réalisation d'une plateforme ouverte de modélisation et de prédiction constitue un objectif essentiel. Durant la première étape, l'équipe a validé un modèle quantitatif de relations nanostructure-activité pour prédire l'absorption cellulaire de nanoparticules dans des cellules pancréatiques cancéreuses. Il est disponible sur la
plateforme Enalos InSilicoNano en tant qu'outil d'aide à la décision pour la conception et le contrôle des nanoparticules.
Les scientifiques ont également développé des méthodes de détection à haut débit dans une cellule isolée, ainsi que le dispositif
VITROCELL Automated Exposure Station pour exposer des systèmes d'essai biologiques aux substances transportées par l'air.
Les résultats ont été largement diffusés par le biais d'articles revus par des pairs, des chapitres de livre et des présentations lors de conférences internationales, et le consortium a déjà identifié quelques candidats potentiels pour la standardisation. Le cadre de sécurité des nanotechnologies de NANOMILE garantira que les progrès technologiques se feront en privilégiant la sécurité.